Romans

Douce – Sylvia Rozelier

Un roman bouleversant sur l’amour, sa folie et les rouages pervers de la dépendance affective.

Thème : drame, amour fou, addiction amoureuse, dépendance amoureuse.

Douce - Sylvia Rozelier

DOUCE – SYLVIA ROZELIER

Résumé

Lorsqu’ils se croisent la première fois, elle ne ressentira rien de particulier, trop de choses les séparent. Et pourtant il finira par l’appeler, comme ça pour un prétexte anodin, puis il rappellera. Ils finiront par s’écrire de longs mails où ils jouent à s’inventer sans savoir qu’ils construisent déjà le langage de leur amour. Et puis, l’amour débarque, en grand, sans partage et envahissant. Désormais elle s’appelle Douce et lui, son loup.

Seulement un loup ne se laisse pas apprivoiser si facilement et rapidement il devient moins disponible. Mais elle attend car elle sait qu’elle n’a déjà plus d’autre choix que celui de ses renoncements. Elle attend des explications, il n’en donne jamais, elle doit se contenter de ce qu’il donne. Pendant des années, elle va accepter les excuses énormes qu’elle pressent mensonges, sans avoir envie de les démasquer, espérant toujours des lendemains enchanteurs. Si elle avait su combien elle se trompait, aurait-elle plongé de la même manière ? Oui probablement …

2 adjectifs qui résument le livre

 

Passionnel : Chaque page résonne de l’irrésistible attraction que ces deux êtres entretiennent, l’un entrainant l’autre pour le rejoindre dans une fusion désespérée pour ensuite le repousser.

Bouleversant : Impossible de ne pas être touchée par cette histoire de femme prise au piège de ses sentiments, qui happée se laisse dévorer par son “loup” révélant sa part de fragilité, ses failles et ses espérances perdues.

 

Ce que j’en pense

 

Un ENORME coup de cœur pour ce livre qui bien sûr me parle particulièrement car je connais bien ce problème de la dépendance affective, mais qui m’a surtout complètement bouleversé.

Non seulement parce j’ai aimé le style et la manière dont cette histoire est construite/ conduite, mais aussi par l’extrême justesse du regard posé par l’auteure sur cette folie amoureuse.

Sylvia Rozelier aime les mots, elle en use et c’est tant mieux parce qu’il n’y a qu’à travers ceux-ci qu’on peut révéler une histoire aussi intime. Les phrases sont courtes, le rythme soutenu, impossible de lâcher ce roman, aspirés que l’on est par l’histoire que Douce écrit à cet homme comme pour en prendre non seulement la mesure mais aussi ses distances. Car il s’agit de comprendre comment tout cela a pu arriver et qu’est-ce qui explique qu’elle ne soit pas parvenue à rompre ce lien infernal.

Dans quelle toile s’est-elle fait prendre, se débat-elle sans l’ombre d’une chance, s’épuise-t-elle pour finir par en sortir exsangue et folle de douleur ? Ce livre c’est en quelque sorte la lettre qu’elle lui écrit et dans laquelle elle tente d’identifier la funeste mécanique de leur passion.

Impossible de prendre ses distances, comme lecteurs, nous sommes impliqués, voyeurs de cette relation que l’on voit s’enfoncer dans une sorte d’irréelle et irrésistible absurdité. On voudrait tendre la main pour retenir Douce mais plus aucun argument raisonnable ne lui est accessible : il lui faut aller au bout de cette histoire, quitte à y laisser sa peau.

Sylvia Rozelier décrit très bien non seulement la perversité de cette relation mais aussi comment sa mécanique se met en place de façon feutrée et pernicieuse. Douce ne voit pas les choses arriver, elle les subit parce qu’elle se croit à l’abri. Elle pense à une histoire sans lendemain, elle qui ne veut pas d’une histoire commune, qui refuse les conventions sur l’amour sans comprendre que c’est justement parce qu’elle les refuse, qu’elle n’en est que plus fragile. Elle construit alors elle-même sa propre prison. Elle aurait pu dire non lorsqu’elle a réalisé que quelque chose déraillait mais comme après tout, elle n’attendait pas une histoire dans la norme alors elle a pu accepter que celle-ci ne se déroule pas “normalement”.

“Je ne savais jamais quand je te reverrais, ni si je te reverrais. Nous ne prenions pas de rendez-vous. Rien n’était prévu et l’imprévu nous était interdit. Nous étions sans échéance. Au début, ce rythme voué entièrement à l’instant m’avait plu. Il me donnait une impression d’aventure, de liberté que j’aimais.”

 

Elle qui s’épanouit dans la relation à deux, découvre la solitude et la terrible attente de l’autre. Elle se retrouve incomplète, en état de manque et devient une autre qu’elle n’a pas souhaité mais avec laquelle il va désormais lui falloir composer. Sans pardon jamais exprimé, ni rupture jamais véritablement prononcée, la relation se cristallise. Le rapport de force est installé. Le “loup” louvoie et elle se retrouve prisonnière de l’insécurité qu’installe cet homme qui dit l’aimer mais ne sème que l’intangible, le silence et l’absence. Un homme capable de nier les évidences les plus flagrantes, incapable d’empathie ou de consolation. Un homme qui laisse une femme en stand-by dans sa vie, qui ne lui offre pas de marques pour qu’elle puisse trouver sa place. Un homme simplement cruel.

“Avec toi, c’était différent. Je n’avais pas peur de toi à proprement parler. C’était moins net, plus insidieux et plus pervers. C’était de l’ordre de l’insécurité, un sentiment d’instabilité que j’avais fini par ressentir à ton contact. L’inconfort du double discours. J’étais sur mes gardes tout le temps, ne savais jamais à quoi m’en tenir. J’avais perdu confiance en toi. C’était une peur épaisse qui allait devenir permanente. M’habiter complètement et tout me prendre.”

“Après ça, j’aurais dû, il eut fallu. Je ne t’ai pas quitté. Je n’ai pas pu. Je ne me l’explique pas. Depuis bientôt sept ans que je te fréquentais, j’avais reculé l’instant fatidique où la vérité éclatant, il ne me serait plus envisageable de continuer, où une force supérieure m’enjoindrait de rompre. M’obligerait. Et voilà que cet instant advenu, il ne m’était pas plus envisageable de te quitter que de mourir.”

“Je n’étais plus en mesure de revenir en arrière, ni d’agir sur mon destin. J’avais épuisé mes réserves. Je me souviens de m’être réveillée un matin avec la conscience aigüe que je n’avais pas la force d’ajouter une perte à l’autre, la douleur de la séparation à celle de la trahison. A ce stade, c’eût été m’amputer d’un membre, m’arracher le cœur. Je ne le pouvais pas. C’était trop tard. Ce n’était pas de l’ordre du choix, de la réflexion ou du pardon. C’était physique. Primaire.”

 

Mais peu importe la réalité, il n’y a plus de correspondance chez Douce entre l’intellect et les affects. Elle a beau être hyperlucide, être attentive à tous les signes qui lui prouvent que quelque chose n’est pas cohérent ou ne va pas dans le bon sens, son cœur refuse de renoncer. “Arracher la perf” comme le lui suggère son amie, que ce “poison” d’amour ne coule plus dans ses veines, elle en est désormais incapable, obsédée, habitée qu’elle est par cette passion, incapable d’un geste pour fuir et se sauver de lui et d’elle-même.

L’idée de cette malédiction féminine, ancestrale, collective à laquelle nous ne pourrions échapper finit par surgir : la femme victime. Douce a beau avoir voulu s’émanciper, celle-ci semble la rattraper. Comme si finalement elle était inscrite en nous irrémédiablement, dans notre inconscient collectif et que nous l’intégrions malgré nous-même …

“Ramenée par le ressac de la vie à cette vérité, au point de meurtrissure, de rouille. Ma peine n’était pas neuve, non. L’est-elle jamais ? Elle me venait de loin, d’une mémoire antérieure, ancestrale et collective. Un chancre. J’avais tellement craint d’être victime à mon tour que je l’étais devenue plus que de raison, refusant de l’admettre et d’agir. J’étais une femme qui ne s’arrachait pas à l’homme qui l’avait meurtrie, ni n’arrivait à lui pardonner, une femme qui se complaisait dans son propre malheur, s’y installait comme y trouvant une deuxième peau, peut-être même une justification.”

“ J’étais revenue dans le giron de ma mère, de ma grand-mère. Des femmes de ma famille qui avaient oscillé entre devoir et amour, avaient souffert des homme. J’avais fait allégeance à leur douleur. »

“J’avais enfilé l’habit de tragédienne. J’étais toutes les femmes et toutes les douleurs. Médée, Andromaque, Phèdre ou Bérénice. Mes sœurs. J’étais une héroïne, toutes les femmes trahies. Bannies, bafouée, en disgrâce, piégée au cœur d’une scène archaïque. J’étais captive de la douleur et j’existais par elle désormais.”

 

Un livre riche, qui porte un vrai souffle et qui nous laisse le refermer douloureusement.

A lire absolument si l’amour et les histoires d’amour sont un sujet qui vous passionne et d’autant plus si vous aussi vous êtes susceptible de succomber à l’amour fou.

Je ne dis pas que lire cette histoire sera miraculeux pour guérir de la dépendance amoureuse mais j’avoue que j’ai pris conscience de certaines choses au travers de celle de Douce. Maintenant comprendre est une chose mais connaissant la logique de cette passion, je ne suis pas certaine, qu’en la matière, un esprit averti en vaut deux… Yeux roulants ♥♥♥

 

ET VOUS, AIMEZ-VOUS CE GENRE DE ROMAN ?

 

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DOUCE – SYLVIA ROZELIER – Editions Lepassage

15 Comments

  • Maryline Bereiziat

    Ce livre me faisait déjà de l’oeil et en lisant la superbe chronique que tu as écrite dessus, j’ai qu’une envie: l’avoir dans ma PAL!!
    Et le lire devant la douce chaleur de ma cheminée cet automne ou cet hiver

  • Anne-France

    Je laisse un commentaire suite au concours sur Instagram.
    Mais je tenais quand même à dire qu’on sent que cette histoire t’a touchée tout le long de ta chronique.
    De mon côté, j’ai la chance d’être avec une personne « normale » car, sinon, j’aurais moi aussi très bien pu me faire avoir par un PN ou quelqu’un du style…
    C’est « grave » de voir à quel point nous, les filles (en grande majorité il me semble) nous pouvons devenir dépendantes de nos relations alors que nous nous sentons assez autonomes pour le reste.
    Courage à nous pour trouver notre vrai bonheur!!

  • Catherine

    Très envie de découvrir l’ecriture de Sylvia Rozelier et ce livre qui fait couler tant d’encre positive ! Merci Emma pour ce concours

  • Louise

    Passionnelle & Lectrice, c’est ainsi que l’on me décrit souvent, alors une chronique écrite comme ça, je ne peux que participer au concours! Ce livre m’intéresse tellement depuis que j’ai lu ta chronique ! Merci d’écrire ainsi, et de donner envie de lire à ce point, merci pour cela, et pour tes pistes quotidiens ou presque, pour tes stories qui occupent une partie de mon temps, et pour les projets que tu déploie pour tes abonnés ! (Instagram : Louise.rb)

  • Fatma

    Le titre de ce livre me donne envie.. encore plus les histoires « d’amour » ou pas , une histoire qui nous laisse en suspense.. et ta chronique me donne envie de vite le lire 🙂 merci à toi pour nous faire découvrir tout cela! Je participe via ton concours insta merci encore 🙂

    • Emma

      Bonsoir Eline,

      Félicitations, tu es la gagnante du tirage au sort, tu as donc gagné ce livre.
      Je te contacte en privé pour que tu me donnes tes coordonnées pour te faire parvenir ton cadeau 🙂
      Très bonne soirée !!!

  • Didoo5652

    Bonsoir

    Je ne dirais pas que »j aime » ce genre de roman mais il aide à comprendre les pourquoi,les comment et permet de visualiser différemment ces moments !
    C est comme le deuil en quelques sortes mais là c’est nous qui sommes plus

  • Lespiverts

    Ce livre me fait très envie. Merci pour cette belle chronique. Je croise les doigts pour gagner ce livre dans votre concours Instagram, mon pseudo: lespiverts bonne journée

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