L’étincelle-Karine Reysset
Roman d’apprentissage et d’adolescence, trouble et envoûtant contant le brusque éveil d’une jeune fille timide à la sexualité et à la vie pendant les vacances d’été dans la riche famille de sa meilleure amie.
Thème : Adolescence, sexualité, homosexualité, trio amoureux, mal-être, difficulté de grandir, timidité, famille.
Sommaire
Résumé de l’éditeur
Je n’ai plus grand-chose à voir avec la jeune fille que j’étais. Elle m’est devenue presque opaque, comme inaccessible. C’est sans doute pour cette raison que j’ai tant besoin de gratter sous la poussière du temps pour la retrouver intacte ». Août 1993, Coralie quitte le modeste pavillon de banlieue de sa mère pour la splendide maison de famille de Soline, peuplée d’amis, de parents et d’enfants dont l’aisance et la culture l’émerveillent. Mais derrière les apparences, les amours débutantes virent à la passion, les secrets inavouables des adultes se révèlent, alors qu’au camping voisin une enfant disparaît. Dans cette atmosphère lascive et trouble, ce sera l’été de tous les apprentissages. Avec L’Étincelle, Karine Reysset livre le roman de cet été brûlant, où une jeune fille en apprendra sur la vie bien plus qu’elle ne l’aurait voulu.
2 adjectifs qui résument le livre
Envoutant : Par l’atmosphère entre douceur de vivre et une tension fébrile, cette impression de marcher constamment sur un fil
Trouble : car rien n’est clair, ni les relations que les différents personnages entretiennent entre eux, ni la mort de cette jeune fille près de la rivière et la brusque disparition de Marco, le garçon avec lequel elle a flirté.
Ce que j’en pense
Eté 93, Coralie encore adolescente timide, timorée, anxieuse et transparente, fait subitement sa mue. Cet été là, lors de son séjour dans la riche famille de sa meilleure amie, Soline, ce sera l’occasion pour elle de se libérer d’elle-même.
Jusque là elle attendait toujours qu’on l’aime, parce qu’elle avait certainement trop manqué d’amour, souffert d’avoir des parents éteints et puritains qui éteignaient la télé dès que s’annonçait une scène érotique. Désormais elle l’a brutalement décidé : elle sera prête à aimer.
“Je m’ouvrais au monde par tous les pores de la peau, les yeux écarquillés, ma bouche offerte, mon sexe offert. Pour tout connaitre. Et tout était si délicieux et si joyeux.”
Véritable roman d’apprentissage, le roman de Karine Reysset est à la fois solaire et sensuel. Bien sûr il se passe finalement peu de choses palpitantes sur la plupart du roman, même la découverte du corps d’une fillette n’amène pas des révélations fracassantes. La mort est dû au père, un fait divers sordide, mais pas plus “anormal” que ce que laisse supposer ce qu’on sait de la nature humaine. D’ailleurs tous ces gens riches qui craignent le qu’en dira-t-on ne se comportent pas non plus très proprement entre eux mais après tout rien qui ne se révèle exceptionnel. Quand on lit le titre, on attend singulièrement un incendie… Or une étincelle peut provoquer aussi un sursaut de vie et c’est ce qui arrive à Coralie.
“J’essaie de trouver un sens pour restituer les évènements tels qu’ils se sont enchainés, alors que mon comportement n’avait rien de cohérent, loin de là. La clé, c’est que j’avais dix-huit ans et qu’on n’est pas sérieux à cet âge-là. J’avais trop souffert de la solitude et de mes pudeurs, je voulais me déverrouiller. Cet été-là, près de la rivière, tous mes loquets sautèrent un à un.”
Finalement cette Coralie n’est pas si éloignée par certains aspects de celle de “Bonjour tristesse”. Un même été brûlant, la liberté d’aller et venir, une adolescente qui s’éveille à la vie, au sexe, qui ne veut plus des règles tristes héritée de sa famille, c’est pour ça que cette famille lui semble plus “brillante” car intellectuellement ils le sont mais ils sont également plus vivants. Ici la mère séductrice de sa meilleure amie montre brutalement son vrai visage, bien plus sombre et manipulatrice qu’on aurait pu l’imaginer : c’est elle qui fera basculer la fin du séjour, éloignant brutalement Coralie. Celle-ci apprendra bien des années plus tard le mariage de Soline, et ce sera l’occasion de plonger à nouveau dans cet été là, sagement rangé dans un coin de sa tête et sorti de sa vie alors même que c’est finalement celui-ci qui construisit la femme qu’elle est loin de sa propre famille qui l’étouffait.
Je regrette un peu que ce roman ne semble s’animer qu’à partir de l’arrivée du jeune oncle Alban, le mouton noir de la famille, vers la page 145. Mais avec le recul, je garde un bon souvenir de cette lecture un peu languissante, il faut parfois savoir accepter le rythme d’une histoire.
Bilan : Livre à lire pour replonger dans les émois de l’adolescence. Peut-être l’occasion de se retrouver et de considérer avec un œil bienveillant cet autre soi-même que l’on fut dans cette partie complexe de notre vie et y reconnaitre ce que l’on doit à ses audaces, ses peurs, ses envies de découvertes… ♥♥