Nous les menteurs – E. Lockhart
J’avoue sans honte passer bien souvent par le rayon jeunesse. Je n’y cherche pas forcément Le livre que je pourrais découvrir avant tout le monde (il y a suffisamment à faire côté adultes ) mais je n’hésite pas un instant quand un titre semble avoir pris un envol spectaculaire auprès de son jeune lectorat car on les abuse souvent bien moins que nous, sur la qualité d’un ouvrage. Ils aiment ou ils n’aiment pas, c’est sans concessions, ni justifications, juste instinctif et parfois l’instinct, ça a du bon.
Autant dire que ce roman est une véritable petite pépite à côté de laquelle il serait dommage de passer.
Sommaire
Résumé
Dans la famille Sinclair, on est riche, très riche et on est parfait, bien entendu.
« Bienvenue dans la splendide famille Sinclair.
Chez nous, il n’y a pas de criminels.
Pas de drogués.
Pas de ratés.
Les Sinclair sont sportifs, beaux, sveltes. Nous sommes une vieille fortune. Nous sourires sont étincelants, nos mentons carrés, nos services de fond de court agressifs…”
Mais surtout, on passe toutes ses vacances dans l’île privée de Beechwood à s’entredéchirer pour le futur héritage paternel sous l’œil impitoyable et, limite pervers, du patriarche, Harry. Les 3 blondes héritières ont donc d’autres chats à fouetter que de s’intéresser à leur progéniture qui en profite pour s’éclater comme il se doit, laissant les adultes à leurs disputes, névroses et crises de jalousie. Ces 4 adolescents en profitent pour savourer pleinement leur liberté, prêtant une oreille et un oeil plus ou moins distraits et blasés aux complaintes de leurs mères, pauvres petites filles riches malmenées par l’existence. Pour eux, qui ont fondé le clan des Menteurs, la vie et l’essentiel sont ailleurs.
Et puis, c’est l’accident. Ce fameux “été 15” (celui de des 15 ans de Cadence, la narratrice) celle-ci est retrouvée sans connaissance sur la plage, incapable de se souvenir de ce qui a bien pu arriver. Terrassée par les migraines et l’amnésie, Cadence se débat pour refaire surface alors que curieusement, tout le monde fait comme si tout allait bien et bizarrement le calme s’est installé dans cette famille qui était au bord de la déchirure…
Deux ans plus tard » été 17″, elle décide de revenir sur l’île pour retrouver le clan des menteurs qui semble depuis 2 ans l’avoir oublié. Elle s’est donnée 4 semaines pour comprendre, pour recouvrir la mémoire et essayer de reconquérir son grand amour Gat.
Attention si vous laissez Cadence vous embarquer dans les histoires de sa magnifique famille décadente, vous ne pourrez refaire surface que 271 pages plus loin, le souffle court, à la fois ébloui, éberlué et abasourdi d’avoir été si facilement entraîné dans ce terrible drame dont vous n’aurez les clés qu’à la toute fin du roman. En tout cas, vous n’oublierez jamais la famille Sinclair
Mon avis
Un roman d’une telle intensité et si habilement construit qu’il m’a été impossible de le lâcher avant d’avoir tourné la dernière page. Nuit blanche assurée !
Le plus troublant c’est que l’auteur sème des clés tout au long de ce récit au suspense stupéfiant mais on ne devient capable de les lire qu’une fois la vérité dévoilée. Inutile de préciser que l’on est alors bon pour reprendre la lecture à son début !
Bien sûr c’est un drame mais la manière d’amener celui-ci permet de se détacher de sa dimension tragique pour n’en voir que la mécanique stupéfiante qui en fait un livre inoubliable.
Une histoire aboutie, déroutante dans laquelle le cynisme des adultes contraste de manière saisissante avec l’idéalisme des adolescents, une réalité brossée progressivement par petites touches qui dresse un tableau final terrifiant. Impossible de vous en révéler plus si ce n’est pour vous dire d’oublier la mention lecture jeunesse pour vous jeter dessus, vous ne le regretterez pas !
A PARTIR DE 15 ANS.
NOUS LES MENTEURS – E.Lockhart – Editions Gallimard Jeunesse