Le 1 nouvelles – été 2017
Quel bonheur de recevoir ce petit opus qui a le bon gout d’avoir une couverture assortie à la couleur de mon dernier carnet.
Au-delà de cette qualité, ce petit hors série publié pour le deuxième été consécutif par le journal “Le 1” est un petit condensé des meilleures plumes du moment sur le thème de “L’ailleurs”. Le thème parfait pour une période où l’expression “s’échapper ailleurs” prend tout son sens.
A noter les préfaces de François Busnel et Eric Fottorino, aussi intéressantes à lire que les nouvelles à venir.
Au delà du format de ce livre qui permet de le glisser dans son sac et de pouvoir savourer une nouvelle entre deux rendez-vous sans avoir à se replonger, pour quelques pages seulement, dans un roman dont on sait que l’on en sera rapidement délogé par les contraintes professionnelles ou autres, ce livre permet surtout de découvrir des auteurs qu’on ne connaissait pas forcément.
Une sorte de buffet littéraire qui nous permettrait de déguster un petit morceau de littérature, de piocher ou de tout dévorer, dans l’ordre ou le désordre mais surtout au gré de nos envies.
Car que de grandes signatures ont participé à ce numéro, rien que le haut du panier, jugez donc : JMG Le Clézio, Tonino Benacquista, Karine Tuil, Valentine Goby… on aurait donc tort de faire les fines bouches
Comment dire ? En réalité, comme beaucoup, je connais les noms des auteurs mais souvent je n’ai pas eu le temps ou l’occasion de lire grand chose.
Sur cette liste, à vrai dire, je ne connais véritablement que 3 ou 4 écrivains, c’est maigre mais ce petit hors série c’est une manière rapide et convaincante de me frotter à leur style, à leur univers, histoire de voir si je pourrais être tentée de faire un petit bout de chemin avec eux, ailleurs, entre d’autres pages et d’autres livres.
Et quelle bonne idée que celle de ce thème de l’ailleurs ! Car si pour moi la définition la plus évidente, celle qui s’impose d’emblée à mon esprit, est celle d’un ailleurs géographique, lointain, souvent exotique, elle est aussi celui du voyage immobile, la lecture et une enfance rêveuse nous ayant souvent donné le goût ou la culture de celui-ci.
Alors comment ne pas se reconnaître (y compris dans ses propres contradictions) dans ces différents récits « d’ailleurs » ?
Qu’il s’agisse de la “religion de l’immobilité” de Lydie Salvayre avec laquelle on s’aventure timidement en tout premier lieu (et qui m’a conquise au point de me demander pourquoi elle n’avait pas croisé mon chemin plus tôt) ou la “tentation de l’immobilité” de Véronique Ovaldé, on se sent en terrain connu. L’une déteste l’ailleurs et l’autre déteste être ailleurs “et pourtant depuis toujours je ne veux qu’une chose : ne pas être ici”. Ceci illustre bien la difficulté de trouver sa place entre fuite, voyage et tentation d’immobilité, envie d’ailleurs et d’enracinement.
J’ai toujours essayé de partir. Je suis en fuite depuis ma naissance. Quand on me demande de mes nouvelles, je réponds au mieux “Je suis par monts et par vaux”, au pire “Je cours comme un lapin”.
C’est complètement réjouissant de pouvoir entrer dans autant d’univers, de conceptions différentes à partir d’un même mot. Pour Valentine Goby, il s’agit d’ailleurs d’un mot blanc, c’est à dire d’un mot émotionnellement neutre qui ne s’anime, ne devient signifiant qu’au travers de l’histoire de quelqu’un. Pour elle, il signifie l’enfance, le désir, le rêve, les voyages de son père. Pour sa grand-mère, le déracinement. C’est certainement pour moi la nouvelle la plus émouvante de ce recueil avec celle de Karine Tuil qui eut à affronter le décès de son père concomitamment à la sortie de son dernier roman “L’insouciance.”
“Depuis toujours, le mot ailleurs glace ma grand-mère de 91 ans. A la lecture de sa vie, il est le nom de l’arrachement, du mouvement perpétuel et du manque. il est le contraire d’un “chez soi” (une expression dont la douceur déborde dans sa bouche : elle évoque la chaleur d’un foyer, l’espérance d’un lieu sûr). Ailleurs c’est nulle part.”
Ce livre m’a notamment permis de redécouvrir avec bonheur la plume de JMG Le Clézio que je n’ai pas lu depuis des années, ravivant l’envie de m’y plonger à nouveau. Mais surtout, j’ai LU Catherine Poulain, qui est pour moi la révélation de ce livre puisque j’ai pu découvrir sa courte biographie absolument incroyable de baroudeuse/globe trotteuse et son écriture/son style qui fleurent bon les grands espaces et la liberté. Depuis, je n’ai plus qu’une urgence, lire son roman “Le grand Marin”!
Ah oui ! Parce que j’ai oublié de le mentionner ! Mais à chaque nouvelle, il y a un petit topo biographique sur l’auteur en question, ce qui permet aussi de se mettre à jour sur l’actualité littéraire en prenant connaissance des derniers titres à lire.
Car si l’été c’est le temps des voyages, c’est aussi le moment de lire !
PS : A noter le petit prix : 6.90€ et les jolies illustrations de Sheina Szlamka -> Je vous en glisse un ou deux ci-dessous 😉