Un certain Paul Darrigrand -Philippe Besson
Retrouver Philippe Besson dans “Un certain Paul Darrigrand” alors que son dernier roman m’avait tant ému, est un de ces précieux moments de lecture qui allie plaisir et émotions .
Encore une fois, il nous livre un roman universel dans lequel les sentiments et la nostalgie nous touchent en plein cœur.
Thème : Homosexualité, amour, passion, adultère, étudiants, maladie, sida, hôpital, rupture, Un certain Paul Darrigrand, Philippe Besson.
Sommaire
PAUL DARRIGRAND – PHILIPPE BESSON
Résumé de l’éditeur
« Cette année-là, j’avais vingt-deux ans et j’allais, au même moment, rencontrer l’insaisissable Paul Darrigrand et flirter dangereusement avec la mort, sans que ces deux événements aient de rapport entre eux. D’un côté, le plaisir et l’insouciance ; de l’autre, la souffrance et l’inquiétude. Le corps qui exulte et le corps meurtri. Aujourd’hui, je me demande si, au fond, tout n’était pas lié. » Après Arrête avec tes mensonges, Philippe Besson poursuit son dialogue avec les fantômes de sa jeunesse et approfondit son souci d’exprimer sa vérité intime. |
☆ Pourquoi“Un certain Paul Darrigrand” de Philippe Besson est un livre à lire ?
- Parce que c’est une histoire universelle , celle de ces premières passions d’amour, irrésistibles, qui nous emportent avant de nous confronter aux abysses de l’abandon.
- Parce que c’est aussi une histoire de maladie et du lien que l’on peut peut-être y voir d’une somatisation de cette impossible histoire d’amour.
☆ Mon avis sur “Un certain Paul Darrigrand” de Philippe Besson
Après « Arrête avec tes mensonges » qui m’avait beaucoup bouleversé, je voulais vraiment lire autre chose de Philippe Besson. Rien que le titre de celui-ci m’a donné l’impression de continuité et au cours du roman, celle-ci a été confirmée.
Philippe Besson ne cherche plus à dissimuler son histoire par la fiction, il utilise désormais le roman pour la révéler . Il est certain que « Arrête avec tes mensonges » a marqué un tournant décisif dans le rapport de l’auteur à l’écriture et à la vérité.
On retrouve donc Philippe Besson, 21 ans, dans un troisième cycle de droit à Bordeaux où il rencontre Paul. Une bousculade, un regard qui dure une seconde de trop, l’assurance de Paul qui s’impose à sa table pour déjeuner avec lui et l’amour surgit, irrépressible. Le besoin absolu d’être ensemble est évident. Mais Paul est marié et il v maintenir cette ambivalence dans son engagement sentimental et sexuel tout au long de cette relation et c’est ce qui fait le plus de mal, qui est le plus destructeur pour Philippe.
« Ça disait que tout le monde a une part d’inconnaissable, j’ai retenu l’expression. Elle me trouble, moi aussi, cette expression : la part d’inconnaissable. L’idée qu’il demeurera toujours chez l’autre quelque chose d’ignoré, de confidentiel, d’irrévélé. »
Philippe devient malgré lui le troisième dans ce triangle amoureux, dépendant de l’agenda de l’autre et de ses désirs, gardé sur le territoire du manque et de la frustration.
Si dans son précédent roman, Philippe Besson a écrit sur le coup de foudre de sa rencontre et la découverte du manque avec Thomas Andrieu. Il y écrit sur l’éblouissement et l’abandon avec Paul.
Cette sensation vertigineuse qui fait définitivement partie de ceux qui expérimente un grand amour passionnel malheureux. De l’Ile de Ré hors saison où l’amour prend forme et corps, à Bordeaux où ils se retrouveront pour s’aimer ardemment dans le petit studio de Philippe. Le désir devient alors omniprésent.
Mais c’est aussi l’histoire d’un adultère dans laquelle la femme trompée ne peut pas imaginer que l’ami qui lui est présenté est aussi celui qui lui vole son mari.Situation qui plonge alors l’amant dans un conflit impossible à résoudre puisqu’il ne peut, pour sa part, se résoudre à haïr cette femme amicale et chaleureuse qui l’accueille à bras ouverts.
Ensuite, la maladie apparaît . celle qui est détectée à l’occasion d’un banal examen de santé alors qu’il n’a que 22 ans et qui s’avère d’une gravité surprenante. Ce sont les années du sida, les années où l’auteur lui-même voit certains de ses amis disparaître. Pourtant, il ne se sent pas en danger. Il a même du mal à croire à la réalité de cette maladie parce qu’il ne pense jamais à sa mort possible.
“N’est-ce pas une somatisation de son amour ?” demandera à son amie Catherine intriguée qu’il soit passé ainsi si rapidement de l’état de grâce amoureux, de « tomber amoureux », à « tomber malade ». Une auto-destruction qui survient précisément en même temps que le sentiment d’abandon.
« En effet, mon corps semblait s’autodétruire à l’instant exact où j’éprouvais un cruel sentiment d’abandon. Ces deux événements n’étaient pas seulement juxtaposés, ils étaient liés. »
On ne peut exclure le lien probable mais il s’agit avant tout de ne pas y laisser sa peau. Il en gardera une cicatrice indélébile, à la fois physique et émotionnelle. Paul sera toujours là, malgré la rupture consommée. Cette histoire restera gravée dans sa mémoire jusqu’au dernier détail. Des détails qui deviennent alors de la littérature, tout comme le personnage de Paul Darrigrand.
Parce qu’il fallait écrire pour que naisse cette histoire condamnée à l’ombre, à être cachée, à n’exister qu’en arrière plan d’une autre vie.
Ne pas écrire, c’était prétendre qu’il n’avait jamais existé. “Écrire pour sauver quelque chose du temps où nous ne le serons plus jamais ».
Prévert : « Je peins malgré moi, les choses derrière les choses. Quand je peins un nageur, je vois un noyé ».
☆ Bilan
Une lecture forcément émouvante avec Philippe Besson qui nous emporte sur ces terres où l’on vibre, sur le terrain de l’intime et des corps mais aussi des souvenirs de ces terribles années sida , quand avoir 20 ans était déjà en soi un danger.
Un Philippe Besson enfin apaisé, heureux de se défaire de la part de roman pour dire la vérité sans fard et sans filtres ♥♥♥
A lire absolument son précédent roman, le très émouvant « Arrête avec tes mensonges » qui permet de mieux décrypter celui-ci.
Vous aussi vous êtes touchés par l’écriture de Philippe Besson ?