Doris-Lessing-Filles-impertinentes
Autobiographie

Filles impertinentes – Doris Lessing

Récit autobiographique de la jeunesse de Doris Lessing et de ses relations houleuses et antagonistes avec sa mère.

Thème : Relation mère/fille, Afrique, colons, jeunesse, genèse d’une écrivaine, Doris Lessing.

Filles impertinentes -Doris Lessing -Emma Perié - livresalire

 

Résumé de l’éditeur

 

Avec Filles impertinentes Doris Lessing nous livre le récit poignant de sa genèse et de sa jeunesse. Elle s’y dévoile sous un jour nouveau et met toute sa puissance de conteuse au service d’un sujet universel: les relations mère-fille. Mordant, plein d’esprit et porté tout au long par une franchise hors du commun, Filles impertinente s est également l’autoportrait saisissant d’un des écrivains les plus libres de son époque.

 

2 adjectifs qui résument le livre 

 

Sincère : Dans ce court récit, Doris Lessing confie avec une franchise absolue ce qui en était de ses rapports avec sa mère, ce qui la poussera à chercher sa place ailleurs très rapidement.

Inspirant : Par son humanisme, son engagement mais aussi cette impertinence et force qu’elle puisera toujours en elle pour suivre ce en quoi elle croit bon pour elle, malgré l’affection défaillante de sa mère. Une force résiliente.

 

Ce que j’en pense

 

Vous dire combien je trouve Doris Lessing plus que passionnante, serait à peine frôler la vérité. Plus je lis d’articles sur elle, plus je me demande comment j’ai pu passer à côté si longtemps.

J’ai voulu commencer avec ce court récit autobiographique car je trouve intéressant de la lire avec ce regard-là avant d’attaquer “Le carnet d’or”, d’avoir en tête le récit de la jeune femme qu’elle fut et de cet héritage qui fait que l’on devient Doris Lessing.

Cette femme pugnace et rebelle, capable de ne jamais se laisser piéger par les étiquettes, capable de dénoncer les illusions et les massacres d’un communisme en lequel elle avait cru et de s’en expliquer  (les réfugiés communistes qui débarquaient alors qu’elle vivait au fin fond du Zimbabwe étaient les seuls qui avaient lus et réfléchis à une autre conception du monde et qui rejetaient l’horrible condition des africains qui la révoltait).

Tout pareillement féministe par nature, cela ne l’empêchera pas de fustiger celles qui n’ont rien compris et qui n’aiment pas les hommes, tout en leur reprochant un dramatique manque d’humour.

Sens de l’humour dont pour sa part elle ne se départira jamais, notamment lorsqu’à 88 ans, surprise de se voir remporter le prix Nobel de la Paix, elle déclarera : “Ils se sont dit celle-là a dépassé la date de péremption, elle n’en a plus pour longtemps. Allez, on peut le lui donner.”

Filles impertinentes c’est le récit de ses relations houleuses et compliquées avec sa mère.

“Autant le dire une fois pour toutes : mes souvenirs de ma mère sont marqués par un antagonisme, une révolte, un sentiment d’exclusion, à quoi s’ajoutait la souffrance de voir que le bébé né deux ans et demi après moi était passionnément aimé, contrairement à moi.”

Une mère infirmière qui avait choisi ce métier pour aider les autres et se faire ainsi aimer puisqu’elle-même avait manqué d’affection dans sa propre enfance. C’est ainsi qu’elle rencontrera le père de Doris, blessé puis mutilé de guerre, dont elle va prendre soin avant de l’épouser.

Mais ce père en veut à l’Angleterre pour laquelle il a trop souffert et accepte un poste de directeur de banque en Perse (Téhéran). Sa femme le suit avec des malles pleine de robes de soirée qu’elle ne pourra pas porter.

Ce sont ensuite les désillusions qui s’enchaînent : la naissance d’une fille non désirée pour laquelle on n’a pas prévu de prénom, le départ pour l’Afrique (l’actuel Zimbabwe) et l’achat d’une ferme isolée, dans l’espoir de faire fortune dans une région sauvage et aride alors qu’on ne connait rien au métier de fermier. Les dettes, l’isolement, l’ennui, l’épuisement, la fille qui quitte l’école à 13 ans sous prétexte qu’elle peut apprendre toute seule ce qui l’intéresse.

Des déceptions qui ne font que se succéder pour cette femme désormais captive de l’amertume de voir sa vie lui échapper et qui se bourre de sédatifs, tout en étant prisonnière des codes et préjugés de cette époque victorienne qui la ferme à toute souplesse d’esprit et qu’elle se montre incapable de dépasser pour se rapprocher de sa fille.

D’autant que celle-ci devenue adulte lui fait honte en enchaînant les jobs, en se mariant et divorçant plusieurs fois, en concevant des enfants de pères différents et en devenant communiste.

L’incompréhension restera totale entre ces deux femmes même si Doris Lessing finira par comprendre sa mère tout en étant persuadée qu’elle n’a d’autre choix que celui de ne pas lui céder et lui reprochera toujours un caractère qui ne lui permettait pas d’affronter les épreuves, contrairement à son père. Elle raconte notamment qu’elle refusa longtemps d’apprendre à conduire, juste pour pouvoir être conduite par ses enfants et son mari pour obtenir d’eux un peu d’aide et de soutien.

“Ce qui m’inquiète aujourd’hui, c’est que mes pensées n’ont guère évolué depuis lors. D’un côté, cette pauvre femme n’avait commis d’autre faute que d’avoir connu une série de malheurs, à commencer par la mort de sa mère quand elle avait trois ans, et elle méritait d’être aimée, soutenue, entourée de tendresse. Pourtant je devais la combattre à tout instant, autrement elle n’aurait fait qu’une bouchée de moi.”

En filigrane, on découvre la société britannique du début du 20e siècle et cette Afrique qui marquera tant Doris Lessing, son œuvre et son engagement. Un empire sur le déclin qu’incarne la mère et dont la jeune Doris Lessing rejette les valeurs pour se jeter dans la vie et le nouveau monde.

« Nous parlons sans cesse du fossé entre les générations. Mais fut-il jamais aussi marqué qu’entre la génération de mes parents et la mienne , Ils croyaient que l’Empire britannique était la plus grande puissance au service du bien existant au monde, et que Dieu était aussi de cet avis. Que les blancs étaient supérieurs à tous les hommes d’autres races, et que le peuple anglais était supérieur à tous les autres peuples blancs. Que la minorité blanche dans les colonies était là, avec l’assentiment de Dieu, pour civiliser et faire progresser les indigènes. Ils croyaient au Devoir. Au patriotisme. A l’Amour du travail bien fait. A la pérennité du mariage. A la vie de famille »

Un livre que j’ai adoré pour tout ce qu’elle nous livre d’inspirant, sur son absence de résignation, sa pugnacité, sa curiosité intellectuelle, son amour de la vie, de la liberté et de la littérature, son esprit d’indépendance, l’écriture envers et contre tout, l’engagement et la fidélité à soi-même et à ses valeurs, son humour et ses colères contre le monde absurde et son humanisme.

Filles impertinentes au pluriel, comme une invitation à l’être.

Bilan : Je crois que je n’ai même pas à en rajouter, tout est dit ! ♥♥♥

 

 

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